mercredi 4 mars 2009

Marie-Noëlle Guès, poursuivie pour avoir filmé l’interpellation de sans-papiers à Calais

DOUAI, 5 mars, Cour d’appel, procès en appel de Marie-Noëlle Guès, poursuivie pour outrage et rébellion.
Témoignage.  Le 23 octobre 2007, je rencontre dans une rue de Calais deux réfugiés politiques érythréens qui viennent d'être libérés de la PAF de Coquelles. Ils m'expliquent leur interpellation et montrent leur avis de reconduite à la frontière daté du jour. Je commence à leur traduire cet avis en anglais et leur propose de combattre l'arrêté du préfet au Tribunal adminstratif de Lille. Nous marchons tout en discutant quand d'autres réfugiés nous demandent de l'aide pour utiliser leur carte téléphonique. Arrive soudain un car de CRS qui pile un peu plus bas. J'arme mon appareil photo rapidement tandis que deux CRS s'éjectent et poursuivent les réfugiés sans papiers. L'arrestation est rapide, pas de violence autre que la poursuite. Tout le monde est ramené près de la cabine téléphonique où les deux Erythréens attendent. On me demande de sortir de la zone de contrôle. Ce que je fais…
Mais poursuivant mon idée initiale de défendre au Tribunal administratif les 2 Erythréens, je discute avec les CRS sur l'impossibilité d'exercer leur droit à un recours effectif dans les délais pour ces deux personnes qui viennent de subir une deuxième interpellation à quatre heures d'intervale. L'un des policiers se retourne et se met à courir tandis que, découvrant la tentative de fuite d'un des réfugiés derrière la barrière policière, je brandis mon appareil photo pour filmer la course poursuite. Mauvaise idée! le CRS qui était resté face à moi entrave l'objectif de ma caméra, la saisit et se met à me tordre le bras jusqu'à ce que je touche le sol, agenouillée de douleur. Je lui fais remarquer que je n'ai rien filmé alors qu'un deuxième CRS m'applique une torsion à l'autre bras. Menottée, on me place dans le car de CRS. J'entends le CRS lancer par radio qu'il a attrapé "la journaliste". Je l'entends aussi lire le nom du café PMU aux portes fermées qui se trouvait face au fourgon. Je me retrouve en garde à vue pour outrage et rébellion.
Le 23 avril 2008, au TGI de Boulogne-sur-Mer, j'ai produit un des deux témoins de la scène. De leur côté, les CRS avaient amené le témoignage écrit de la propriétaire du café PMU. Le procureur a requis 3 mois de prison, le tribunal m'a relaxée. Les deux CRS et le parquet ont fait appel. L’avocat général a requis 3 mois de prison avec sursis et 500 euros d'amende avec sursis. Délibéré le 2 avril.
Lire aussi la tribune de Marie-Noëlle sur Rue89.

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