mardi 10 mars 2009

Violences policières. Le commissariat des Orteaux (Paris 20e) : une zone de non-droit ?

EN FRANCE, CRACHER PAR TERRE EN ATTENDANT L’AUTOBUS PEUT VOUS CONDUIRE EN GARDE A VUE AVEC PRELEVEMENT D’ADN, VIOLENCES, POURSUITE POUR OUTRAGE & REBELLION… SURTOUT SI VOUS ETES UNE FEMME…
Après le témoignage d’Agathe (procès le 25 novembre à Paris), victime de violences de la part de policiers du commissariat de la rue des Orteaux, dans le 20e arrondissement de Paris, voici maintenant celui de Siham, interpellée dans des conditions quasi-similaires (sur la voie publique, de nuit, violences exercées sur une femme par des flics machos, sadiques [et pas seulement des hommes], dont les méthodes évoquent davantage une dictature qu'une république) par des fonctionnaires de police du même commissariat.
Accusée d’outrage, rébellion et violences, Siham G. passe en procès le 4 septembre, devant la 30e chambre du TGI de Paris. Elle est défendue par Me Irène Terrel.
Délibéré le 18 décembre 2009.

LES FAITS
Samedi 24 janvier 2009, vers une heure du matin, place de la Nation, j’attends un bus de nuit à un arrêt de bus. Je suis un peu alcoolisée, j'ai bu environ 4 verres de vin rouge. Mais j'ai absolument tous mes esprits, je ne titube pas, je ne présente aucun signe d'agitation. Je suis seule et ne prête aucune attention aux voitures qui passent. J'avance un peu au bord du trottoir (je ne descends pas sur la route) pour guetter au loin l'arrivée du bus. Je suis enrhumée, me mouche et crache à mes pieds. Je vois alors deux hommes en uniforme de policiers à la stature imposante sortir d'une voiture, se précipiter sur moi en hurlant que j'ai craché sur eux. Je leur explique que je viens seulement de les apercevoir, que j'ai craché à mes pieds et que j'en ai parfaitement le droit. Ils sont très agités et refusent de m'écouter. Je continue de leur expliquer que mon crachat ne leur était pas destiné, que j'attends simplement le bus. Mais l'un d'eux me saisit très violemment par les poignets et me passe les menottes en m'expliquant qu'il m'emmène au poste pour y passer la nuit en garde à vue. Je suis prise de panique, c'est la première fois qu'on me passe des menottes et je crie au secours, que je n'ai rien fait qui justifie cette agression, je me débat et refuse de les suivre dans la voiture. Je suis profondément choquée par ce que je considère comme une agression et j'appelle au secours. Il n'y a personne. Le bus de nuit que j'attendais passe alors que les policiers tentent de me faire entrer dans la voiture, je leur demande de me laisser monter à bord du bus, que je veux rentrer me coucher. Les policiers refusent, me brutalisent. Le bus ralentit, je me débats, je continue d'appeler à l'aide et explique que je n'ai rien fait, mais le bus ne s'arrête pas et les deux hommes réussissent à me faire entrer dans le véhicule et démarrent. Je suis sous le choc, je viens de me faire agresser par deux hommes, de nuit, alors que j'étais seule et parfaitement calme. Je leur demande ce qui justifie cette arrestation, ils m'expliquent qu'ils ont été outragés par mon crachat et m'accusent de leur avoir tiré la langue. Je nie catégoriquement les faits, leur répète que je ne les avais pas vu avant de les voir surgir de leur voiture, que c'est à mes pieds que j'ai craché et que je ne leur ai jamais tiré la langue. Je leur dis aussi que les menottes me font mal aux poignets, je leur demande de les desserrer. Ils refusent et me demandent: "A quoi croyez-vous que servent les menottes, mademoiselle?" (Durant toute la procédure j'ai demandé qu'on me desserre les menottes, ce qui a à chaque fois été refusé, excepté le lendemain après-midi, alors que mes poignets avaient triplé de volume.)
Je suis profondément bouleversée, je leur explique que je ne comprends pas, qu'il y a méprise. Nous arrivons au poste de police où j'explique que je viens de me faire arrêter abusivement, mais personne ne m'écoute, je demande qu'on me rende ma liberté, qu'on me retire les menottes et me laisse rentrer chez moi. On me demande de souffler dans l'éthylotest, je commence par refuser, rien ne justifiant qu'on entame une procédure de garde à vue. On tente de me faire souffler par la force, je me débats. Une femme policer se jette alors sur moi, et au milieu de la pièce, sans me signifier une fouille en règle commence à m'arracher mes bracelets. Je lui demande de faire attention à mes bijoux qui ne se détachent pas facilement. Mes bracelets et certains de mes colliers sont noués et ne possèdent pas de fermoir, il faudrait donc défaire les nœuds pour ne pas les abimer. Au lieu de ça je sens que la femme les arrache brutalement et les sectionne, (ils sont désormais détruits, je possède toujours les débris). Elle me répond qu'elle "n’a rien à faire de mes bijoux de merde" et me frappe à plusieurs reprises la tête contre le mur carrelé, me causant des douleurs à la tête insoutenables. Elle tire sur un de mes colliers, me plaque la tête contre le mur et appuie brutalement sur ma carotide, me coupant le souffle, m'empêchant de respirer: je suis prise de fureur et la mords au petit doigt, au travers de son gant en cuir. Ce geste était un acte de défense, de détresse intense: l'arrachage, le mépris de mes bijoux et la dignité de ma personne, ainsi que la violence avec laquelle j'étais traitée portait atteinte à mon intégrité, m'humiliant et causant chez moi une incompréhension totale. J'étais impuissante, menottée, violentée, on était en train de me frapper la tête contre un mur carrelé, de m'empêcher de respirer, de m'arracher mes bijoux en m'expliquant clairement qu'on n'en avait rien à faire, et ce devant plusieurs témoins, gardés à vue et policiers. J'ai hurlé ma souffrance d'être traitée ainsi, j'ai crié à l'injustice et me suis débattue alors qu'on me violentait. J'étais profondément choquée, et je cherchais juste à me défendre et faire respecter mes droits fondamentaux d'individu. J'ai ensuite été plaquée à terre par plusieurs policiers. J'ai ensuite accepté de souffler dans l'ethylotest: bien sûr positif. J'ai été placée en cellule de dégrisement jusqu'au matin, puis gardée à vue au commissariat de la rue des Orteaux jusqu'en fin d'après-midi, alternativement menottée (humiliation! douleur!) à un banc ou enfermée en cellule. On ne m'a pas proposé de petit déjeuner, j'ai dê réclamer à manger vers 11 heures.
J'ai refusé d'abord que l'on me prenne mon ADN, puis, devant la menace de prolongement de garde à vue ainsi qu'une très forte amende et un emprisonnement, j'ai finalement accepté, ce qui va à l'encontre de mon opinion: je considère que je n'ai rien commis qui justifie que mon code génétique soit saisi sur un fichier, et conservé à vie. Aujourd'hui, mercredi 28 janvier, je suis encore sous le choc des événements, je suis fatiguée nerveusement et présente encore des bleus et contusions aux maxillaires, au cou, aux poignets, aux bras, aux épaules et aux jambes. Je me considère comme ayant subie des violences injustifiées, de la torture physique et suis profondément choquée psychiquement.
Lors de mon passage à l'hôpital j'ai montré au médecin, qui les a constatées, les marques profondes qu'avaient laissé les menottes à mes poignets, les marques sur mes épaules, mes bras et mes jambes ainsi qu'à mon visage. J'ai aussi expliqué que j'étais en état de choc d'avoir été violentée et humiliée, qu'il s'agissait d'une erreur policière. j'ai demandé au médecin de ne pas me laisser retourner en cage mais il a refusé.
Lors de l'ouverture de mon dossier au matin, j'ai demandé à visionner les images de mon arrestation, imaginant bien qu'elle a été filmée par une caméra, ayant eu lieu place de la Nation. On m'a répondu qu'il n'y avait pas de caméra, ce que je demande à vérifier. Je réfute le fait d'avoir tiré la langue aux policiers et de, comme écrit sur ma convocation, "avoir craché au pied du policier". J'affirme que je n'ai PAS PU cracher au pied du policier puisqu'il était dans sa voiture à ce moment-là. J'ai craché à mes pieds alors que la voiture de police n'était pas encore arrêtée à mon niveau. Je n'ai aperçu les policiers qu'au moment où ils se sont arrêtés et ont surgi de la voiture. Il s'agit donc d'un mensonge des policiers, qui m'ont tout simplement agressée. Maintenant je dois justifier de m'être défendue. Malheureusement c'est ma parole contre leur assermentation, et je suis considérée comme en état d'ivresse (alors que j'avais tous mes esprits). Mauvais pour moi.

3 commentaires:

outrageur condamné a dit…

Marre de tout cela. il va falloir trouver des moyens pour que le CODEDO se fasse entendre.

Unknown a dit…

c'est choquant ! pourquoi representants de la lois refusent de filmer toutes leurs interpelations ? c'est pas pour rien ! pour tant dans les rue, pour les gens lambda ce serait normal d'etre filmer. meme les politique sont les premiers a museler ou controler les journalistes des que quelque chose d'important se passent.
On est dans une republique bananiere.
c'est ecoeurant !

Ya_l a dit…

j'en ai les larmes aux yeux!
Dans le même quartier une amie qui venait déposer une main courante après s'être faite agressée s'est entendue dire "madame la prochaine fois à minuit vous resterez chez vous bien sagement à manger des pâtes au lieu de sortir seule".
Je suis choquée, notre pays me fait honte.